Elle est seule à la terrasse d 'un café.
Vous pensez : tiens, elle attend quelqu'un?
Eh bien ! détrompez-vous, elle n'attend personne.
"Seule, je suis, et seulette veux être"
sans seigneur ni maître,
libre de mon temps, de mes actes, de mes pensées;
Elle est seule à sa table
et contemple d'un regard serein
les passants.
Rien ni personne ne peut lui ôter
cette quiètude qui l'enveloppe
quand elle songe au cours fougueux et tranquille
qu'elle a su imprimer à sa vie;
Ce qu'elle fait et ce qu'elle pense
vient de son propre cru.
Elle ne subit aucune pression, aucune influence.
Pourtant, elle eut une mère dévouée
toujours prête à se sacrifier
pour les uns et pour les autres.
Justement,c'est pour s'opposer à un modèle aussi pesant
qu'elle a choisi de privilégier sa liberté et son indépendance.
Certes, si elle avait vu sa mère
souriante et pleine de compassion,
si elle l'avait sentie épanouie
dans cette vie de sacrifice !
Mais il n'en était rien.
Il lui semblait que le meilleur du coeur de sa mère
avait été étouffé par ses dons incessants et obligatoires,
que le meilleur d'elle était resté enfoui
et qu'elle était morte avant même d'être née.
Et cela lui était une souffrance insupportable.
Elle était seule à, pouvoir redonner vie à sa mère
en affirmant ce qu'elle était,elle , sa fille.
Voilà à quoi songeait cette jeune femme
assise seule à la terrasse d'un café.
Parfois, quand même, quand elle voyait deux êtres
fort épris l'un de l'autre
ou une maman avec ses enfants
ou toute autre personne veillant sur une autre,
elle se disait qu'il pouvait y avoir de la joie à se dévouer
mais le temps pour elle n'était pas encore venu...
Seule une joie assez forte la sortirait de sa bienheureuse solitude.
Ce moment viendrait, elle le savait.
Et pour le moment, elle était bien
assise seule à la terrasse d'un café.
(pour la petite fabrique d'écriture)